Le lendemain, Niji alla en cours, préoccupée. Durant la nuit, les visages de Sunako et Yuki lui vinrent en tête. Leur ressemblance était flagrante. Mis à part leur différence de taille, ils paraissaient être de vrais jumeaux. Sans le savoir, ils la préoccupaient beaucoup et elle voulut faire tout ce qu'elle peut pour eux, même si elle devrait être détestée. A son regret, aucune berline ne l'attendait devant le lycée. Elle entra d'un pas lent en même temps que Kyoichi.
- Salut. Ça va? Demanda-t-elle.
- Super, hier, je suis sorti avec Izumi et ça c'est bien passé. Déclara-t-il heureux.
- Cool, ça marche bien entre vous alors.
- Ouais, jusqu'à la prochaine crise.
C'était dans une bonne humeur que la journée se poursuivit. Niji n'échappa pas au récit de la veille par Izumi qui lui raconta tout dans les moindres détails. L'après-midi, Niji était plus absente. Ne pouvant plus aller voir Sunako, elle devait trouver une autre occupation. Sa mère avait prévue un dîner en tête-à-tête avec Takahumi. Elle ne voulait absolument pas rentrer.
- Izumi ? Karaoké? Demanda Niji, le sourire aux lèvres
- Quand, ce soir?
- Bien sur, c'est moi qui invite. Insista-t-elle.
- Désolééééé. J'avais prévu ma soirée avec Kyo-kun.
- Pas de problème, une autre fois alors.
- D'accord, je t'inviterai. Izumi lui fit un clin-d'oeil.
Complètement dépressive, Niji s'en alla vers sa librairie préférée, voir les nouveautés et acheter quelques mangas. Quelques nouveautés intéressantes dont elle retint les noms pour la prochaine fois. Elle prit un livre et s'installa sur la seule table de libre, juste pour le bouquiner et éventuellement l'acheter.
Au bout du deuxième chapitre, elle fut complètement absorbée par le livre, elle ne remarqua absolument rien, ni la présence en face d'elle d'un étranger.
- Excusez-moi, je peux m'installer ici? Fit la voix étrangère.
Il n’était pas japonais et avait un accent européen. Elle redressa sa tête brutalement, lui donnant un vertige passagé. Chiisu était en face d'elle. Elle écarquilla les yeux, ne s'attendant pas à sa présence. Bouche bée, elle se souvint qu'il lui avait posé une question
- Non, non, je vous pris. Répondit-elle finalement.
Son sourire lui réchauffa son coeur.
- Bonsoir Niji. Je ne pensais pas te voir.
- Moi non plus.
Afin d'éviter d'être une idiote une nouvelle fois, elle se replongea dans son livre.
« Des jeunes gens et des jeunes filles dansaient sauvagement autour de lui et, parmi eux, je vis le même jeune homme dont les yeux rayonnaient d'excitation tandis que des prêtresses couronnées de fleurs lui amenaient une silhouette voilée, que je savait être moi-même. Puis il m'enleva dans ses bras.
Maintenant, nous étions sous la charmille sacrée. Il arracha le voile de la vierge et je vis mon visage illuminé de joie. J'aperçus le croissant de lune entre les feuilles nouvelles, puis la scène se fondit en une pluie d'étoiles et je fus de nouveau moi-même »
Même le livre était traître. Niji referma d'un geste vif le livre et soupira pour ne pas s'énerver sans raison.
- Tout va bien? S'inquiéta Chiisu.
- Euh oui... ce livre m'ennuie.
D'un geste rapide, il prit le livre posé sur la table et analysa la couverture.
- La prêtresse d'Avalon... de Marion Zimmer Bradley... lit-il. Cet auteur écrit beaucoup sur les mythologies notamment sur le roi Arthur. Si je ne me trompe, La Prêtresse d'Avalon est son dernier roman, depuis, elle est morte. De plus, ce livre clôt une série commençant par les Dames du Lac, une histoire sur les chevaliers de la table ronde et de Merlin.
- Vous avez lu tous ces livres pour la connaître aussi bien?
- J'en ai lu deux ou trois, dont celui-là. A chaque livre, je m'intéresse à l'auteur ainsi que les contextes du roman, pour mieux le comprendre et être du même point de vue que l'auteur.
- Vous devez avoir une grande culture.
- « grande », je ne pense pas, reprit-il. La culture est quelque chose de vaste et infini. Personne ne peut être cultivé sur tout. Je connais pas mal de choses en littérature, mais d'autres m'échappent.
Discuter avec lui fut un énorme plaisir aux yeux de Niji. Elle en avait perdu la notion du temps, mais pas lui.
- Wouuh, que le temps passe vite. Je vais rentrer. Je pense que tu devrais toi aussi rentrer, ta mère devrait s'inquiéter.
- Ne vous en faîtes pas pour elle, elle est très occupée. Dit-elle d'un ton amer.
- Bien, alors au revoir !
Il lui posa le livre en face d'elle.
- Même si le début est ennuyeux, je te conseille de lire, il est très intéressant.
Elle prit le livre entre ses mains comme un cadeau.
- Je vous le promets ! Jura-t-elle.
Elle le voyait sortir d'un pas nonchalant. Inconsciemment, Niji se dirigea vers la caisse et paya le livre ainsi que d'autre mangas, puis sortit. D'un coup de regard, elle chercha Chiisu, puis le vit de l'autre coté de la rue. Elle traversa en courant, puis à quelque pas de lui, reprit son souffle. Elle le suivit – du moins, l'itinéraire était le même pour tous les deux. En bas de chez elle, elle aperçu Chiisu avancer plus loin, puis s'arrêter à deux maisons d'elle. Elle courut une nouvelle fois vers lui.
- Dites moi ! Si vous êtes autant intéressé par les livres, vous devez avoir une belle collection.
- Oh que oui. Avoua-t-il. J'ai même du mal à les ranger tellement j'en ai.
- Pourrais-je empreinte quelques livres chez vous ? A vrai dire, je n'ai pas grand chose à lire. Mentit-elle en cachant le sac de la librairie derrière elle.
Toutefois, il n'était pas dupe et remarqua le sac en plastique au couleur de la librairie. Cette demande n'était pas innocente, juste un moyen, selon lui, pour elle de ne pas rentrer.
- Je t'en pris, essaye de trouver ton bonheur à l'intérieur, mais pas mal de livres sont encore dans des cartons.
Il l'invita à rentrer. Toute enthousiaste, Niji pressa le pas. |